26 novembre 2023
Le secteur des pratiques de soins non conventionnelles est en plein essor et s'est renforcé avec la crise sanitaire. Ainsi, près de 40 % des Français ont recours à des soins alternatifs. Or ces publics sont parfois en situation de grande vulnérabilité. Ils consultent dans une période de mal-être ou confrontés à un problème que la médecine conventionnelle ne leur semble pas pouvoir résoudre. Pour ces raisons, la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) intensifie sa vigilance autour de ces pratiques.
Après une première enquête réalisée en 2018, la DGCCRF a lancé une nouvelle campagne de contrôles, entre octobre 2020 et septembre 2021. Le champ des investigations a été étendu par rapport à la précédente enquête. C'est ainsi que près d'une cinquantaine de disciplines différentes ont été contrôlées. Allant des plus connues comme la naturopathie ou la réflexologie, à certaines plus rares comme les guérisseurs Reiki ou des pratiques revendiquant une action sur les ondes ou les flux d'énergie (access bars, thérapie quantique, biorésonance, géobiologie, magnétisme…). Les contrôles ont été menés auprès des professionnels et des centres de formation. Le but étant de vérifier l'exhaustivité de l'information délivrée aux consommateurs et la loyauté des pratiques commerciales.
Les services de la DGCCRF ont relevé un taux d'anomalie de 66 %. Ce chiffre est à peine inférieur à celui issu de la précédente enquête de 2018, mais sur un nombre plus restreint de pratiques. Cela est principalement pour des faits de pratiques commerciales trompeuses ou des défauts d'information précontractuelle.
Une confusion sur le statut professionnel et des allégations trompeuses.
- l’environnement : certains praticiens s’installent à proximité ou au sein d’un établissement de santé (maison de santé, cabinet médical pluridisciplinaire…). Cette proximité, sans plus de précision sur la non appartenance au corps médical du praticien, est source de confusion pour le consommateur.
Par ailleurs, certains professionnels n'hésitent pas à reprendre les « codes » médicaux, créant un doute dans l'esprit du consommateur sur la nature de la prestation :
- présence des plaques devant les lieux d'exercice ;
- recours à un logo ressemblant à un caducée ;
- exposition d'ouvrages médicaux dans les salles d'attente ou le lieu de consultation.
À noter que ces praticiens sont référencés dans des annuaires dédiés aux professions médicales et paramédicales. Ainsi, cela contribue à induire en erreur le consommateur.
- La communication
Il ressort de l'enquête que ces professionnels sont parfaitement conscients de ne pas appartenir au milieu médical. Néanmoins, certains d'entre eux usent abondamment dans leur communication de termes en rapport avec la santé. Pour autant le Code de la consommation encadre leur utilisation (art. L.121-2 et L121.3. « sont réputées trompeuses, les pratiques commerciales qui ont pour objet : […] d’affirmer faussement qu’un produit ou une prestation de services est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations »).
Certains praticiens se présentent comme étant capables de traiter certaines pathologies. Citons en exemple des allégations qui prétendent guérir des pathologies comme le cancer, le sida ou la dépression. Ce discours est d'autant plus grave que cela entraîne une perte de chance d'amélioration ou de guérison du malade. D’autant plus que ces patients sont susceptibles de se détourner de leurs traitements médicaux habituels.
D’autres tiennent des discours qui encouragent ouvertement à renoncer aux traitements conventionnels.
Les pratiques commerciales trompeuses représentent environ les deux tiers des infractions relevées par voie de procès-verbal pénal. En complément, les autorités compétentes reçoivent régulièrement des signalements pour exercice illégal de la médecine et usurpation de titre.
L'influence de la crise sanitaire :
Certains professionnels se sont adaptés aux restrictions imposées par la crise sanitaire en proposant des séances à distance. Cette modalité leur permet de toucher un public plus large.
Certaines pratiques interrogent :
Comme par exemple, la réalisation de séances de Reiki à distance via une photographie ou une application de messagerie instantanée. Sachant que le principe de cette pratique repose à l’origine sur le toucher, cela semble pour le moins surprenant… Dans le même registre, des praticiens proposent également des séances de réflexologie à distance.
Les centres de formation :
Il existe de nombreuses formations sans encadrement officiel. Elles sont dispensées à des tarifs et pour des durées très variables, allant de quelques heures à plusieurs années.
En outre, les durées de formation sont très disparates, parfois pour une même discipline. Cela interroge sur la plus-value réelle de certaines formations et sur les véritables compétences acquises.
Les centres de formation sont axés sur l'apprentissage des disciplines. Ils n'informent pas sur les obligations issues notamment du droit de la consommation ou du Code de la Santé Publique. Ainsi, il apparait nécessaire qu’une formation à une pratique mentionne le cadre règlementaire applicable à cette dernière. Elle doit également alerter les stagiaires sur les risques en matière d'exercice illégal de professions de santé ou d'usurpation de titres.
Pour conclure, les contrôles de la DGCCRF ont révélé que certains formateurs utilisent des allégations thérapeutiques strictement interdites. Ces centres de formation fournissent à leurs élèves un modèle de publicité comportant ce type d'allégations et les incitent à l'utiliser.
Les soins non conventionnels participent à une prise en charge pluridisciplinaire du patient, ce qui est excellent pour une approche holistique. En revanche, en tant que patient, vous êtes en droit d’exiger un professionnel qualifié (art. 1110-3 du Code de la Santé Publique sur le droit à la protection de la santé).